Les noctambules ou ceux qui ne comptent pas les heures au cœur de la nuit ont découvert son visage un peu après minuit, éclairé par la lampe de la caméra. Ils ont vu les cernes creusés et le large sourire qui illuminait le visage de Charlie Dalin à bord de MACIF Santé Prévoyance. Après 11 jours de mer, il vient de remporter la New York Vendée – Les Sables d’Olonne.
Première transat en IMOCA remportée en solo, deuxième victoire d’un bateau mis à l’eau l’an dernier et nouveau succès ajouté à un des palmarès les plus fournis de la course au large. Charlie le sait et il savoure, les yeux déjà rivés sur le Vendée Globe. Quelques minutes après l’arrivée, il est revenu longuement sur sa course et l’émotion qui va avec avant de bénéficier de quelques heures de sommeil bien méritées pour profiter de la remontée du chenal ce dimanche matin.
Charlie Dalin : « cette victoire tombe à point nommé ! »
Auteur d’une course maîtrisée de bout en bout, le skipper de MACIF Santé Prévoyance a frappé fort à six mois du Vendée Globe. Il revient sur sa victoire, le lien qu’il tisse avec son nouveau bateau et la confiance emmagasinée avant le plus connu des tours du monde.
New York Vendée :
Qu’est-ce que tu as ressenti en franchissant la ligne ?
Charlie Dalin
C’est vraiment génial de remporter cette course. Après 11 jours de mer, c’est sympa d’arriver aux Sables d’Olonne et de sentir l’odeur de la terre. Je suis vraiment heureux pour MACIF et pour l’équipe !
New York Vendée :
Cette victoire, c’est surtout le fruit de cette décision, ce passage de front que tu es le seul à avoir franchi avec Boris… Est-ce que tu peux revenir sur ce moment clé ?
Charlie Dalin
Oui, ça a été le point décisif de cette course. J’étais bien placé par rapport au front. Nicolas Lunven (Holcim-PRB) était juste à côté de moi mais il est repassé du mauvais côté, il n’avait plus le bon angle de vent. J’ai dû tirer la barre un peu plus pour être sûr de rester du bon côté. 15 heures plus tard, le front m’a à nouveau rattrapé, il y avait des nuages, de la pluie et il a fallu accélérer pour ne pas se faire rattraper…
New York Vendée :
Quand tu as vu que l’écart se creusait, quel était le sentiment qui prédominait ?
Charlie Dalin
C’était juste génial ! J’ai passé beaucoup de temps à regarder les images satellites pour savoir si je prenais de l’avance sur le front. Tu donnes, tu donnes, tu sais que chaque mètre gagné va compter… J’ai tout fait pour rester devant : je me suis forcé à ne pas faire de manœuvre ni de changement de voile pour ralentir le moins possible. Rétrospectivement, j’aurais dû accélérer plus tôt : l’angle que j’avais était ultra risqué mais c’est passé.
New York Vendée :
Derrière, les choix au sein de la flotte ont été très différents… Quel regard portes-tu sur la course des autres skippers ?
Charlie Dalin
Je n’ai pas vraiment regardé dans le détail. Un moment, j’ai eu peur du groupe des sudistes parce qu’il avait un bon enchaînement pour remonter au ras du centre dépressionnaire. Par ailleurs, j’ai longtemps pensé que Boris (Herrmann, Malizia-Seaexplorer) ne pouvait pas revenir jusqu’à hier où ça m’a un peu stressé avant que tout ne rentre dans l’ordre.
New York Vendée :
Tu as la sensation d’en savoir plus sur ton bateau, d’avoir appris beaucoup ?
Charlie Dalin
Oui, je suis vraiment content d’avoir passé onze jours en plus à son bord. J’ai appris sur la façon de l’utiliser, sur mes réglages, sur ses réactions face au vent, sur l’utilisation de la zone de vie. Il commence à me rentrer dans le sang, je sens que je fais corps avec, que je perds moins d’énergie à trouver les bons réglages. L’objectif, c’est de le connaître suffisamment pour pouvoir se concentrer sur la météo, la stratégie et la vie à bord.
New York Vendée :
Tu sens qu’il est un cran au-dessus de ton précédent bateau, Apivia ?
Charlie Dalin
Oui clairement ! Il est plus performant au près, au reaching, au portant, en ergonomie… C’est un super bateau et je m'en rends compte à chaque fois que je suis bord à bord avec un autre bateau.
New York Vendée :
Tu renoues avec la victoire après ton absence pour forfait cet automne… Ça ajoute une dimension en plus ?
Charlie Dalin
Oui forcément que ça compte après ma fin d’année tronquée. Ça me redonne confiance dans ma capacité à gagner. Mon bateau commence à avoir un beau palmarès avec deux victoires en trois courses (avec la Rolex Fastnet Race l’été dernier). Et puis c’est ma première victoire en solitaire sur une transatlantique en IMOCA. Ce succès tombe à point nommé, ça va booster toute l’équipe avant le Vendée Globe !
New York Vendée :
Ce dimanche matin à partir de 9 heures, tu vas remonter le chenal… Prêt pour cette belle fête ?
Charlie Dalin
Oui bien sûr ! Ça fait partie de la légende de la Vendée et des Sables d’Olonne. Lors du dernier Vendée Globe, à cause du Covid-19 et du confinement, tout le monde n’avait pas pu en profiter donc on a hâte de vivre ça avec le public. Ça aura forcément un avant-goût de Vendée Globe.
New York Vendée :
Est-ce qu’avec l’expérience tu profites un peu plus encore de ces moments ?
Charlie Dalin
Oui, je crois que j’apprends à profiter de toutes ces petites choses agréables quand elles sont là. Clairement, je suis heureux. J’ai passé le cap des 40 ans début mai et je viens de gagner la première course que je dispute dans cette nouvelle décennie… Je ne suis pas encore à la retraite ! (rires)
