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« Compliqué à petite comme à grande échelle »

Ce samedi, à terre comme en mer, tous les regards sont portés sur lui. Et pour cause, il pose bien des questions. Le fameux front stationnaire que sont en train de rattraper les 28 marins de la deuxième édition de la New-York Vendée – Les Sables d’Olonne se révèle particulièrement difficile à appréhender. En avant de ce petit talweg (*), l’instabilité est énorme. Le vent passe allégrement de 5 à 25 nœuds et impose aux solitaires une attention de tous les instants. En l’état, pas facile pour eux de se projeter. Ils doivent malgré tout commencer à penser à la suite car très vite des choix de route importants vont devoir être opérés. Sur le papier, trois grandes options semblent en effet possibles pour rallier l’arrivée même si la situation générale demeure extrêmement brouillonne.

Sam Goodchild à bord de VULNERABLE
Sam Goodchild à bord de VULNERABLE
© Pierre Bouras / TR Racing

« Il est impossible de relâcher son attention. Le vent saute de 5 à 25 nœuds constamment et sans transitions entre ces deux extrêmes. C’est orageux, il pleut, on se prend grain sur grain. Du coup, il est impossible de connaitre la direction du vent sur le fond. C’est le bazar et ça se voit clairement à l’AIS. Il y a des bateaux dans tous les sens et à toutes les vitesses ! », a commenté Conrad Colman (MS Amlin) lors de la vacation officielle, ce samedi. C’est un fait, sur l’eau, il n’y a pas deux concurrents qui affichent le même cap ou la même vitesse au même moment. L’instabilité de l’air est totale à l’approche du petit talweg dépressionnaire qui se dresse sur leur route. « C’est très dur de suivre tous les changements du vent, en force comme en direction. On essaie de faire au mieux. C’est un moment clairement sensible. La priorité, c’est de ne pas casser le bateau, de trouver le meilleur compromis de voiles et d’essayer s’en sortir du mieux possible », a confirmé Sam Goodchild (VULNERABLE) qui sait que le plus dur à passer est précisément en ce moment et qu’à partir de cette fin d’après-midi ou de ce soir, il va récupérer un flux de secteur sud sud-est soutenu (25 nœuds avec des rafales à 30 voire 35) sur une mer relativement plate. Dès lors, comme les autres leaders, il pourra se reposer a minima, ne plus voir son speedo (**) faire constamment le yo-yo mais, au contraire, bombarder sur des rails.

Au nord, au sud ou au milieu ?

« A l’arrière du front, les conditions s’annoncent parfaites pour les foilers. Ils vont se retrouver au reaching (***) et aller très vite en tribord amure », promet en effet Christian Dumard, le consultant météo de l’épreuve qui prédit toutefois de nouvelles complications à moyen terme. En cause, un col barométrique (****) dont la présence se confirme dans l’ouest de l’archipel des Açores et que les marins vont devoir choisir de contourner par le nord ou par le sud. Vu les écarts en latéral au sein de la flotte, on peut imaginer que certains ont d’ores et déjà fait leur choix. Sam Davies (Initiatives-Cœur), Jingkun Xu (Shingchain Team Haikou) ou plus encore Benjamin Dutreux (GUYOT environnement – Water Family) pourraient avoir d’ores et déjà opté pour une route sud. Boris Herrmann (Malizia – Seaexplorer) et une poignée d’autres pourraient, pour leur part, encore être tentés par une route nord. Une route qui pourrait, de facto, se montrer payante mais qui comporte cependant clairement quelques risques. A date, elle obligerait notamment à traverser une nouvelle zone de molle et rallongerait considérablement le chemin avec une remontée au-delà de la latitude du nord de l’Irlande (56° Nord). Une autre alternative existe toutesfois et c’est vraisemblablement une piste que devraient suivre un grand nombre de concurrents du peloton de tête, à savoir une trajectoire médiane. Pas forcément gagnante selon les routages, cette solution, qui imposerait de tirer des bords au près, pourrait néanmoins être plus intéressante dans les faits qu’en théorie. « Aujourd’hui, ça semble le choix le plus réaliste », a souligné Sam Goodchild qui se laisse encore le temps de la réflexion.

 Un véritable champ de mines

Idem pour les autres marins du groupe des leaders, actuellement emmenés par Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance) même si on commence à avoir une petite idée de leurs intentions. Il n’est pas à exclure que derrière, en particulier ceux qui pointent au-delà de la 10e place et ceux ne sont clairement pas à leur place, comme Yannick Bestaven (Maître CoQ V), Romain Attanasio (Fortinet – Best Western) ou Maxime Sorel (V&B – Monbana – Mayenne), choisissent de lâcher davantage leurs coups en profitant de la complexité du schéma actuel en Atlantique Nord. « Je regarde devant avec plein d’espoir. La situation est compliquée. Dans les heures qui viennent, ça va sans doute partir par devant. Après, heureusement, il risque de se passer encore beaucoup de choses. Rien n’est clair. D’ici à l’arrivée, il va y avoir des arrêts pour tout le monde, je pense », a relaté Yannick Bestaven tôt ce matin. « C’est compliqué à petite comme à grande échelle. C’est difficile pour tout le monde et ça va vraisemblablement rester un champ de mines jusqu’au bout », a attesté Conrad Colman. Tant et si bien que les ETA (estimations d’heures d’arrivées) ne cessent de reculer. Les premiers sont à présent attendus sur la ligne entre le 9 et le 11 juin, pas avant.

(*) zone allongée de pression atmosphérique relativement basse

(**) indicateur de vitesse

(***) allure où le vent arrive au bateau par son travers, entre 80 et 110 degrés

(****) zone située entre des dépressions et des anticyclones disposés en croix

 


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